La covid-19 a facilité l’adoption des nouveaux carburants maritimes

La nouvelle norme IMO 2020 imposant l’utilisation de carburants maritimes moins soufrés est entrée en vigueur le 1er janvier 2020 dans un climat d’appréhension. Les raffineries de pétrole ne paraissaient pas prêtes à fournir les quantités voulues de mazout à faible teneur en soufre et on craignait que les armateurs ne se rabattent sur du carburant diesel, provoquant une flambée des prix pour ce carburant. Mais ces craintes ne se sont pas matérialisées et la transition a été facilitée par une alliée imprévue : la covid-19.

Rappelons que la norme IMO 2020 (du nom de son promoteur, International Maritime Organization ou Organisation maritime internationale) modifie la teneur maximale en soufre des carburants utilisés dans les navires commerciaux. Avant 2020, celle-ci était fixée à 3,5 %. Depuis 2020, elle est limitée à 0,5 %. On s’attend à ce que ce changement diminue les émissions de dioxyde de soufre de 80 % environ. Elles passeraient de 15 à 3 millions de tonnes par année environ.

La nouvelle norme a d’abord été adoptée en 2008, puis confirmée en 2016. Ces longs délais s’expliquent par le fait que les carburants maritimes sont généralement du mazout de très faible qualité, constitué de la fraction du pétrole qui résiste à la distillation et qui accumule toutes les impuretés. Il est techniquement possible de le transformer en diesel par hydrocraquage ou de désulfurer (voir ici et ici des textes plus détaillés à ce sujet), mais cela exige de coûteuses transformations aux raffineries.

On craignait donc de manquer de mazout propre au début de 2020. Le risque était que les armateurs soient forcés à acheter du diesel, qui est très peu soufré, bien au-delà de norme IMO 2020, mais dont la production est déjà absorbée par d’autres industries. Cela aurait provoqué une pénurie et une flambée des prix. L’onde de choc aurait aussi pu se répercuter sur le carburant d’aviation (carburéacteur), qui aurait pu en partie être converti en diesel pour répondre à la demande.

mazout singapour

Une transition en douceur

En pratique, ces craintes ne se sont pas matérialisées. Les raffineries, qui semblaient très en retard dans leur programme de désulfuration du mazout en 2018, ont terminé leurs travaux de transformation dans le courant de 2019. Ceci a permis aux armateurs d’opter pour du mazout peu soufré au lieu de se rabattre sur le diesel, conforme, mais plus cher, et de provoquer une pénurie.

La covid-19 a également aidé. La demande de diesel, et surtout de carburant d’aviation, a plongé à partir du mois de mars et les raffineries en ont moins produit. Elles ont donc décidé de moins en distiller et de plutôt transformer une plus grande proportion du brut en mazout. De plus, les besoins en transport maritime ont également diminué en raison de l’épidémie. Autrement dit, non seulement il n’y a pas eu de ruée sur le diesel, mais de plus le mazout désulfuré est devenu une solution pour les raffineries désirant réduire leur surproduction de diesel et de carburéacteur!

Mazout non conforme

Peu de tricheurs

On craignait aussi que de nombreux armateurs continuent d’utiliser du mazout soufré en raison de son prix très peu élevé. Mais le pourcentage d’échantillons de carburant non conformes prélevés lors de vérifications est passé d’environ 1 % en début d’année à 0,6 % seulement à la fin de l’été 2020. La part du mazout soufré dans le marché des carburants maritimes, pour sa part, est passée de 81 à 14 %. Certains armateurs utilisaient déjà des carburants propres avant 2020 et la majorité de ceux qui utilisent du mazout soufré l’utilise de concert avec un épurateur (scrubber) qui retire le soufre après combustion.

En résumé, un an près l’adoption de la norme IMO 2020, le mazout désoufré ne manque pas et il n’y a pas eu de flambées des prix du diesel. Grâce à la covid, les raffineries ont pu compter sur des surplus de pétrole plutôt que de gérer des flux tendus, ce qui a facilité la transition. Les armateurs ont adopté le nouveau carburant et le nombre de tricheurs est très limité. L’Organisation maritime internationale peut donc légitimement dire : « Mission réussie! ».

Sources :

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