La consommation élevée d’électricité du Bitcoin pourrait être encore plus élevée qu’on le croit. C’est du moins le résultat d’une nouvelle étude menée le chercheur hollandais Alex de Vries, qui estime de plus que la consommation par transaction pourrait encore tripler cette année. Le Bitcoin pourrait dès cette année dépenser autant d’énergie que petites nations industrielles comme l’Irelande ou l’Autriche. Et le coût par transaction peut représenter des semaines ou des mois de consommation électrique.
Le système du Bitcoin repose des algorithmes mathématiques complexes qui permettent à la fois de créer de tenir un registre distribué des transactions (le blockchain) et de créer de nouvelles unités de cette devise (le minage). Le système de minage est conçu pour produire un nouveau Bitcoin aux dix minutes environ et il limite cette production en rendant le calcul toujours plus complexe. Autrement dit, plus d’ordinateurs essaient de créer des Bitcoins, plus la difficulté augmente et plus il faut y affecter de nouveaux appareils. La consommation énergétique croît en proportion.
Les algorithmes en question effectuent une conversion mathématique d’un type particulier, appelé le hachage. À la mi-mars 2018, le système effectuait, dans son ensemble et simplement pour la création de nouveaux Bitcoins, 26 quintillions de hachages à la seconde, soit 26 suivi de 30 zéros. Mais il n’y avait que de 2 à 3 transactions à la seconde portant sur des Bitcoins existants, de sorte que chaque transaction réelle était appuyée par au moins 8,7 quintillions de hachages.
Cette invraisemblable quantité de calculs est effectuée par des ordinateurs spécialisés dans le hachage. Combien consomment-ils d’électricité? L’un des meilleurs appareils actuellement sur le marché, appelé Antminer S9, consomme 1372 watts de courant et effectue 14 000 milliards de hachages à la seconde. On ne sait pas combien des appareils sont en activité au juste, mais on peut en évaluer le nombre en divisant le nombre total de hachages dans le monde par la quantité effectuée par chaque appareil.
En multipliant le nombre d’appareils par leur consommation, on évalue la consommation totale du système, soit au moins 2,55 GW. Ceci suppose que seuls les appareils les plus performants sont utilisés, alors que certains plus anciens sont encore en activité. Ce chiffre ne tient pas compte non plus de l’énergie utilisée pour refroidir tous ces centres de données qui produisent beaucoup de chaleur. Les mineurs de Bitcoins étant plutôt discrets, on ignore quelle est la consommation moyenne des activités de refroidissement.
Alex de Vries croit donc que l’estimation de 2,55 GW n’est qu’un minimum et que la consommation d’électricité pourrait atteindre jusqu’à 7,67 GW en réalité. Par ailleurs, au rythme de production actuel, on vendra environ 6,5 millions de nouveaux Antiminer S9 cette année, dont la consommation combinée atteindra 8,92 GW. Certains des plus vieux ordinateurs seront sans doute remplacés, dont ce n’est pas un ajout net, mais cet appareil ne détient que 70 % du marché – d’autres producteurs contribuent aussi à augmenter le parc d’appareils de minage et la consommation électrique.
En somme, selon le chercheur, le système du Bitcoin consommera cette année de 2,55 à 7,67 GW d’électricité sur une base continue et sans doute encore plus à l’avenir. Ceci met le système à égalité avec la consommation totale de pays comme l’Irlande (3,1 GW) et l’Autriche (8,2 GW). De plus, comme le système n’effectue que 200 000 transactions financières par jour, chaque transaction exige au final plus de 300 kWh d’électricité, un chiffre qui pourrait monter jusqu’à 900 kWh vers la fin de 2018.
À titre de comparaison, la consommation mondiale d’électricité est de 3128 kWh par personne et par année. Elle atteint 15 546 kWh au Canada et 6938 en France, mais 2584 en Roumanie et 1356 en Algérie. Une seule transaction de Bitcoin représente donc plus d’un mois de consommation mondiale moyenne par individu en ce moment, et l’équivalent d’une saison entière d’ici la fin de 2018.
La communauté Bitcoin est consciente du problème et étudie diverses approches pour l’atténuer, mais les résultats de ces démarches demeurent incertains. « Pour l’instant, conclut Alex de Vries, le Bitcoin a un gros problème, qui croît rapidement. »
Source :
Alex de Vries, Bitcoin’s Growing Energy Problem