L’autre bombe à retardement de l’industrie pétrolière albertaine

Les gaz à effet de serre ne constituent pas le seul cadeau empoisonné de l’industrie pétrolière. L’Alberta pourrait compter jusqu’à 250 000 puits de pétrole abandonnés et plus de 25 000 hectares de bassins de décantation fortement contaminés. Ce legs toxique est soumis à très peu de surveillance et l’industrie pétrolière montre très peu d’empressement à nettoyer ce saccage. En fait, il est à peu près certain que les contribuables canadiens vont devoir un jour assumer l’essentiel de la note, en raison de l’incroyable laxisme du gouvernement albertain.

KOROL Syncrude tailings

Les bassins de décantation sont d’immenses étangs artificiels où l’industrie des sables bitumineux rejette ses résidus d’exploitation. Ils contiennent un mélange d’acides, de benzène, de plomb, et de fines particules d’argile. On les décrit parfois comme une sorte de yogourt toxique. Les plus anciens de ces bassins, âgés de 50 ans, montrent encore peu de signes de décantation réelle. Ces bassins sont retenus en place par ce qui serait les plus grandes structures de terre au monde.

Le plan de décontamination de l’industrie consiste à pomper ces boues dans de profonds puits de mine à ciel ouvert, puis à recouvrir le tout d’une couche d’eau douce. Les promoteurs du projet estiment – sans fournir de preuves convaincantes – que l’eau et les résidus ne se mélangeront pas. Les coûts du projet sont évalués par les pétrolières elles-mêmes, sans qu’elles n’aient à fournir de pièces justificatives. De plus, l’Alberta a récemment accordé un délai de 70 ans à la pétrolière Suncor pour mettre ce plan en œuvre après la fermeture de ses installations en 2033.

L’Alberta compte également 150 000 puits de pétrole et de gaz abandonnés ou inactifs, certains depuis plus de 40 ans. À ceci s’ajoutent 100 000 puits non officiellement abandonnés, mais qui ne paient plus de redevances et vont sans doute devoir être pris en main par l’État. Cette situation est reliée au cadre réglementaire unique de l’Alberta, qui n’impose aucun délai aux exploitants pour nettoyer les puits fermés. Ceci est à comparer à la situation au Dakota voisin, qui ne compte aucun puits abandonné en dépit du boom pétrolier des dernières années.

De plus, un récent jugement d’une cour albertaine donne priorité aux créanciers sur les travaux de remise en état de l’environnement en cas de faillite d’une entreprise pétrolière. Ce jugement doit être révisé par la Cour Suprême du Canada ce printemps et s’il est confirmé, il donnera le signal pour l’abandon d’autres puits par des entreprises en difficulté financière.

Pas de provisions financières

Depuis 1975, l’Alberta a produit 4 800 000 milliards de mètres cubes de gaz naturel, 17,4 milliards de barils de pétrole et 11,4 milliards de barils de bitume, pour une valeur totale d’environ 1700 milliards de dollars canadiens. Sur ce montant, l’industrie a mis 1,4 milliard de dollars en réserve pour nettoyer ses dégâts. Mais les coûts du nettoyage pourraient atteindre 27 milliards selon l’industrie elle-même et 48 milliards selon les observateurs indépendants.

En principe, les coûts du nettoyage sont couverts par la valeur des produits qui restent à extraire. Mais il s’agit surtout de bitume, dont l’exploitation est contestée, peu rentable et possiblement menacée par les énergies renouvelables. Le manque de provisions financières oblige donc l’Alberta à poursuivre sa fuite en avant en exploitant coûte que coûte cette ressource. Une décision d’autant plus regrettable qu’en raison des très faibles tarifs en vigueur, les redevances pétrolières ne représentent qu’un maigre 4 % de revenus de l’Alberta.

Comme c’est la triste tradition dans l’industrie minière canadienne, le gouvernement fédéral sera sans doute un jour obligé de dépenser des milliards pour réparer l’incurie du gouvernement de l’Alberta.

 

Sources :

Une réflexion sur “L’autre bombe à retardement de l’industrie pétrolière albertaine”

  1. Bravo au Gouvernement albertain pour leur laxisme! Encore des enveloppes brune je suppose. Le fédéral pourrait les obliger mais ils sont complice des compagnies de pétrole. Belle gang de Bandit à cravate.

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