Le taux de retour énergétique (EROEI) de l’énergie solaire serait compris entre 22 et 52 pour 1, selon le niveau d’ensoleillement du site. Ce sont là les résultats d’une nouvelle étude américaine publiée le 1er juin dans la revue Progress in Photovoltaics. Ces chiffres corroborent ceux de l’étude de l’Institut Fraunhofer, en Allemagne, dont ce blogue a rendu compte en mai. L’étude américaine présente ses calculs de manière plus détaillée que la précédente et montre à quel point l’amélioration des techniques de fabrication des panneaux solaires contribue à ces étonnants gains de rendement.
L’étude est signée par Vasilis Fthenakis, du Brookhaven National Laboratory, et par Enrica Leccisi, de l’Université Columbia. Elle s’intéresse au cycle de vie des panneaux photovoltaïques et tout particulièrement à leur temps de retour énergétique – la période de temps nécessaire au remboursement du coût énergétique de leur fabrication. Les pnneaux sont classés en deux catégories, mono et multicristallins. Ils sont également évalués en fonction de trois niveaux d’ensoleillement type, soit 1000, 1700 et 2300 kWh/m²/année, ce qui correspond approximativement aux valeurs que l’on retrouve en Allemagne, dans le sud de l’Europe et sous les tropiques.
Le calcul du temps de retour énergétique s’appuie sur une méthodologie normalisée entre autres par l’ISO et par l’Agence internationale de l’énergie. Elle s’intéresse non seulement à l’énergie utilisée et à l’impact des gaz à effet de serre, mais aussi à celui de divers contaminants chimiques sur l’eau et le sol. Les calculs sont faits en fonction du mix énergétique chinois, dominé à 59 % par le charbon et donc plus polluant que la moyenne. Il s’intéresse de manière détaillée aux diverses étapes de fabrication des panneaux.
Calcul du taux de retour énergétique
Les données montrent que le coût énergétique de la fabrication des panneaux solaires a beaucoup diminué depuis 2015. Une des raisons, c’est que la couche photosensible en silicium s’est amincie, passant de 200 microns en 2015 à 170 en 2021. Cette évolution est plus sensible sur les cellules en silicium monocristallin (single cell Si, sc-Si) que sur les cellules en silicium multicristallin (multiple cell Si, mc-Si). La réduction atteint respectivement 46 et 20 % et le coût énergétique du panneau solaire est désormais inférieur à 2000 MJ par mètre carré.
En ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, l’étude établit que l’impact de la production des panneaux solaires s’établit aujourd’hui à 1010 ou 1087 kg d’équivalent CO2 par kilowatt de puissance installée, selon qu’un panneau est mono ou multicristallin. Ces chiffres sont respectivement 49 et 42 % moins élevés qu’en 2015. Comme ceux de l’énergie utilisée, ils peuvent paraître élevés dans l’absolu, mais il faut garder à l’esprit qu’ils s’amortissent sur de très longues périodes. L’étude considère que la durée de vie d’un panneau est de 30 ans.
Après avoir calculé le coût énergétique du panneau, les chercheurs calculent ensuite le rendement énergétique espéré sur 30 ans en fonction de l’ensoleillement (irradiation), du facteur de charge et du rendement moyen mesuré sur les systèmes mono et multicristallins. Selon le cas, le temps de retour énergétique oscille aujourd’hui entre 0,6 et 1,3 année, alors qu’il pouvait atteindre 2,5 ans en 2015.
Calculé sur 30 ans, ce temps de retour énergétique correspond à un taux de retour énergétique (EROEI) compris entre 22 et 52 pour les panneaux monocristallins et entre 20 et 47 pour les panneaux multicristallins.
Comment expliquer une telle différence?
Mon texte précédent sur l’étude de l’Institut Fraunhofer expliquait pourquoi plusieurs études obtiennent des valeurs beaucoup plus basses pour le taux de retour énergétique. En résumé, beaucoup d’entre elles reposent sur des données périmées ou attribuent aux seules énergies renouvelables le coût des systèmes énergétiques devant prendre la relève en cas non-production. En réalité, tous les systèmes énergétiques, y compris l’hydraulique ou le nucléaire, s’appuient en tout temps sur d’autres systèmes tenus en réserve en cas de panne.
Une autre explication tient au fait que la différence entre un EROEI de 10 et un de 50 n’est pas aussi considérable que les chiffres ne le laissent penser de prime abord. Dans le cas d’un EROEI de 50:1, 2 % de l’énergie produite est utilisée pour alimenter le procédé de production, tandis que les 98 % qui restent constituent l’énergie utile, mise à la disposition de la société. Lorsque l’EROEI tombe à 10:1, l’énergie utile représente toujours 90 % de l’ensemble. De très grandes variations d’EROEI se traduisent donc par des variations modérées de l’énergie utile. Le tableau ci-dessus montre l’énergie utile pour diverses valeurs d’EROEI.
Stockage et démantèlement
Les chercheurs abordent sommairement la question de l’impact des systèmes de stockage sur batterie et du coût énergétique du démantèlement des parcs photovoltaïques.
Les chercheurs n’ont pas inclus le coût énergétique du stockage sur batterie dans leur calcul du taux de retour énergétique parce qu’ils estiment qu’il est préférable de calculer ce coût au niveau du réseau électrique plutôt qu’au niveau du parc solaire pris isolément. Ils estiment néanmoins que la capacité de l’énergie solaire à réduire l’utilisation d’énergie thermique n’est pas substantiellement affectée par l’installation de batteries. L’ajout de batteries se traduit par une augmentation d’à peine 7 à 30 % du temps de retour énergétique, selon l’irradiation reçue par la site. En termes d’émissions de gaz à effet de serre, l’ajout de batteries a un effet neutre, leur coût en carbone étant compensé par une réduction équivalente des émissions liées à la production d’énergie thermique.
Le coût énergétique du démantèlement des parcs et du recyclage des composants n’a pas fait l’objet d’une évaluation formelle, en raison d’un manque de données fiables sur l’empreinte de ces activités. Toutefois, les chercheurs estiment que la récupération en fin de vie de matériaux très énergivores, comme l’aluminium et le cuivre, pourrait faire en sorte que les bénéfices énergétiques du recyclage dépasseraient les coûts du démantèlement. Ceci améliorerait encore un peu plus le taux de retour énergétique de l’énergie photovoltaïque sur l’ensemble de son cycle de vie.
Source :
Fthenakis, Vasilis & Leccisi, Enrica. (2021). Updated sustainability status of crystalline silicon‐based photovoltaic systems: Life‐cycle energy and environmental impact reduction trends. Progress in Photovoltaics: Research and Applications. 10.1002/pip.3441.
Etrange de traduire silicon par silicone au lieu de silicium. C’est un peu embêtant pour la crédibilité de l’article, qui pourtant est intéressant 😦
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Vous avez raison, c’est une erreur de ma part. Merci de me la signaler, je vais corriger.
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Bonjour je n’ai pas l’impression que l’électronique ait été prise en compte. S’il est discutable de ne pas tenir compte des batterie, il est impossible de ne pas tenir compte des onduleurs-MPPT qui font partie de l’ensemble.
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Il n’est pas explicitement question des onduleurs dans mon texte, mais l’étude en tient compte, dans la catégorie balance of systeme (BOS). On lit: «The analyzed PV systems are composed of PV panels and balance of system (BOS) (mechanical and electrical components such as inverters,transformers, and cables, as well as system operation and maintenance). As mentioned in the introduction, the most mature PV moduletechnologies have been considered, namely, sc-Si and mc-Si.»
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Avec de tels rendements il y a un mystère: comment se fait-il que la production d’électricité des panneaux photovoltaïques n’est pas réservée à la production d’usines de fabrication de panneaux photovoltaïques?
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Pourquoi devrait-elle l’être? L’impact sur les émissions est la même où que soient déployés ces panneaux.
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L’impact sur les émissions oui! Mais l’économie? Les $$$? Pourquoi n’y a-t-il pas d’industriel attiré par la perspective de tels rendements?
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il y a une erreur grossière sur l’énergie utile. Il faut comparé les chiffres pour une unité dépensée : ERORI de 100 : 99 dispo pour 1 consommée
ERORI de 10 : 90 dispo pour 10 consomées DOOONC : 9 dispo pour 1 consommée : il y a un facteur 10 entre l’efficience des deux ….
Si quand je vous investissez 1 € on vous donne le choix entre 9 et 99 € ne dite pas que la différence est minime ….
si avec un litre d’essence une voiture parcours 9 ou 99 km il y a tout de même une différence notable.
mais bon chacun essai de faire dire ce qu’il veut aux chiffres
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Votre calcul est inexact, vous confondez un rapport et une quantité absolue. La différence entre les deux n’est pas d’un rapport de 1 à 10, mais seulement 10% en quantité. La chose n’est pas controversée, tous les experts de l’énergie vous répondront la même chose.
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Bonsoir,
je ne confond pas je regarde ce qui doit l’être : ERORI est un ratio qui donne le facteur multiplicateur. et je me base sur le même chiffre de départ et pas d’arrivée.
Si l’investissement est de 1 (pour les deux) la différence entre un ERORI de 10 et celui de 100 c’est 99-9 = 90 … pour un même investissement de 1
Dit autrement vous avez dépensé 9 fois plus d’énergie pour atteindre le même résultat
votre calcul n’est pas faux (je suis d’accord, vous avez fait une soustraction), c’est juste que c’est un angle de vision que je trouve totalement baisé si l’on cherche à être le plus efficient avec nos ressources.
Mais allons plus loin et réalisons maintenant 9 cycles (on réinvesti l’énergie gagnée 9 x de suite car on a besoin de développer de nouveau moyen de production)
ERORI de 10 : 1w investi -> 10w au premier cycle -> 100w au second -> … 1GW au 9eme
ERORI de 100 : 1w investi -> 100 w au 1er -> 10 000 au second …. 1 000 000 000 GW au 9eme
c’est plus tout à fait pareil …
Reprenons également votre exemple où les deux chiffres sont égaux en fin de premier cycle (?!):
ERORI de 10 : 10w investi -> 100w au premier cycle -> 1000w au second -> … 10GW au 9eme
ERORI de 100 : 1w investi -> 100w au premier cycle -> 10 000 au second …. 1 000 000 000 GW au 9eme
Ecart au bout du premier cycle 90 W
Ecart au bout de 9 cycle 999 999 900 GW
alors oui un ERORI de 10 permet de récupérer 90 % d’une énergie produite … mais l’énergie produite sera bien plus faible que l’énergie développée avec un ERORI de 100 (10 x moins à chaque cycle ) c’est pour cela que je regarde le ratio et pas une différence sur une valeur d’énergie finale identique entre deux ERORI
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