La fusion reviendra plus cher que les renouvelables

La fusion nucléaire ne sera jamais exploitée commercialement, estime le chercheur italien Giuseppe Cima. Une partie du problème est lié à l’extrême lenteur des progrès de sa mise au point. Mais plus grave encore, la fusion exige de par sa nature même des équipements massifs et complexes. L’énergie produite commercialement dans une centrale à fusion coûtera plus cher que celle produite dans une centrale nucléaire, qui est elle-même déjà plus chère que l’électricité solaire ou éolienne. La fusion est donc plombée par ses coûts avant même d’avoir vu le jour.

Giuseppe Cima est un chercheur italien à la retraite, qui a fait la majeure partie de sa carrière dans le secteur de la fusion avant de perdre la foi et de se lancer en affaires. Dans son billet publié il y a deux jours, le chercheur note que la recherche sur la fusion se concentre maintenant sur le tokamak, un concept lancé par les Soviétiques en 1958. Cet appareil vise à confiner le plasma issu de la fusion dans un champ magnétique stable.

Tokamak Lausanne
 Chambre de réaction d’un tokamak expérimental situé à l’École polytechnique fédérale de Lausanne.

Ce que retient surtout Giuseppe Cima, c’est que les essais montrent que les grands tokamaks marchent mieux que les petits. La raison en est très technique, mais peut se résumer à deux facteurs. D’une part, la fusion produit de l’énergie en fonction de la densité du carburant, ce qui suppose de faire réagir une assez grande masse d’atomes. D’autre part, le plasma produit tend à prendre de l’expansion et doit être confiné dans un espace restreint par un puissant champ magnétique. Il faut un réacteur de grande taille pour atteindre un point d’équilibre entre ces deux contraintes.

Le réacteur expérimental ITER, par exemple, est un tokamak dont le cœur fait 30 mètres de diamètre sur 20 mètres de hauteur. Il pèse 30 000 tonnes et, à puissance égale, il occupe à peu près dix fois plus d’espace qu’un réacteur à fission. La construction d’ITER coûtera plus de 20 milliards $, une facture qui reflète sa très grande complexité technique. Cette complexité augmente par ailleurs le temps nécessaire à l’expérimentation. Les essais avec carburant réel doivent commencer en 2035 et se poursuivre pendant au moins dix ans. De sa conception initiale à sa fin, le projet aura duré près de 50 ans et il ne vise qu’à comprendre la physique en cause, pas à produire de l’énergie utilisable.

Il faut aussi noter que la fusion n’est pas aussi propre qu’on le dit. Le carburant et les produits de réactions sont moins radioactifs quand dans le cas de la fission, mais le cœur de 30 000 tonnes es fortement irradié et présente une immense masse de déchets à traiter en fin de vie, ce qui ajoute aux coûts d’un tel projet.

En somme, la recherche va prendre encore plusieurs décennies et son succès est loin d’être assuré. Et même si elle débouchait sur un réacteur commercialement viable, sa masse et sa complexité feraient augmenter le coût de production de l’électricité à environ 12 cents du kWh, en supposant que d’autres coûts ne s’ajoutent pas en cours de route.

En comparaison, l’énergie solaire et éolienne est déjà disponible. Sa relative simplicité permet une production de masse. Son coût de revient est actuellement compris entre 2 et 7 cents et risque de baisser encore. Même en tenant compte des coûts reliés à la gestion de l’intermittence, les énergies renouvelables sont déjà moins chères que la fusion, ce qui la rend obsolète avant même d’avoir été mise au point.

 

Source :

Giuseppe Cima, Nuclear Fusion: is it still worth investing on it in an age of cheap renewable energy?

 

 

3 réflexions sur “La fusion reviendra plus cher que les renouvelables”

  1. > L’énergie produite commercialement dans une centrale à fusion coûtera plus cher que celle produite dans une centrale nucléaire, qui est elle-même déjà plus chère que l’électricité solaire ou éolienne

    Mensonge qui tourne en boucle dans les média… mais qui n’en fait pas une vérité pour autant.

    D’ailleurs, si c’était le cas, on se demande bien pourquoi on est obligé de soutenir autant l’éolovoltaïque par des subventions, obligation de rachat, etc.

    « L’imposture du coût du kilowattheure photovoltaïque ou éolien »
    https://www.energie-crise.fr/L-imposture-du-cout-du-kilowattheure-photovoltaique-ou-eolien

    En plus, de par l’intermittence et l’absence de solution de stockage à l’échelle du problème, éolovoltaïque = centrales à gaz… alors que l’objectif officiel est justement de sortir des énergies fossiles.

    « 100% renouvelable pour pas plus cher, fastoche ? »
    https://jancovici.com/transition-energetique/renouvelables/100-renouvelable-pour-pas-plus-cher-fastoche/

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    1. Je veux bien admettre que le prix réel des renouvelables est plus élevé que le prix des contrats d’approvisionnement, mais les derniers contrats solaires en Allemagne ont quand même été adjugés à 4,7 cents. Dans l’état actuel des lieux, même si le solaire se revendait 2,5 plus cher que le prix du contrat, il serait encore concurrentiel avec la fusion

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  2. NYOUZ2DÉS: dans ce texte nous voyons réapparaître encore et toujours les mêmes bobards. J’ignore s’ils proviennent de la traduction de l’étude de Giuseppe Cima ou de Philippe Gauthier lui-même, mais une chose est certaine: il ne les dénonce pas. Il faut que le message soit clair: les énergies éolienne et solaire ça ne vaut rien. Par exemple, une éolienne produit du courant en moyenne 44,3 heures par semaine (voir « énergie éolienne » sur Wikipedia). Même avec des batteries ou un système STEP il est impossible de distribuer ce courant sur 168 heures (1 semaine), à moins de croire à la multiplication des pains comme dans la bible. Sans compter que le coût du kw/h augmente considérablement (et pas de 2,5 cents). Il serait temps que Philippe Gauthier lise les articles de Jean-Marc Jancovici sur ces sujets.

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